Modèle social

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  • Date de Publication: 20/05/2016
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Grégoire Leclercq est président de la FEDAE, cofondateur de l’Observatoire de l’Ubérisation et dirigeant d’entreprise. Cette tribune a été publiée le 19 mai sur la Tribune et sur Le Nouvel Economiste.

Chère URSSAF,

Le dernier rebondissement en date dans la grande affaire Uber est donc votre arrivée parmi les protagonistes. Vous portez à votre tour le fer contre le grand méchant américain, car d’après vous, il doit payer les cotisations de Sécurité sociale et les allocations familiales de ses chauffeurs, dont vous prétendez qu’ils sont en fait des salariés déguisés.

Vous le savez bien : en agissant ainsi, vous rejoignez la grande cohorte grincheuse de tous ceux qui s’opposent à Uber et à son modèle. Après le gouvernement, les taxis traditionnels, certains parlementaires, les syndicalistes, les manifestants de #NuitDebout (qui rentrent quand même chez eux en Uber parce que c’est plus pratique), voici le dernier adversaire d’Uber.

Il faut dire que les analystes attendaient depuis longtemps cette estocade et que les pronostics sur la requalification des chauffeurs allaient bon train. Après le cas américain et la class action avortée en Californie, il fallait bien que, sur le vieux continent, Uber soit en prise aux mêmes problèmes. Bingo ! Vous n’avez fait mentir personne, pas même Uber qui a du provisionner ce qu’il faut comme frais juridiques pour mener ce nouveau combat.

Mais il ne faut pas s’y tromper : votre combat dépasse largement le cas Uber. Et pas seulement parce que l’ensemble de l’économie de plateformes est suspendue aux décisions qui seront prises dans cette bataille. Derrière cette confrontation se cache en effet une question beaucoup plus ample : pourrons-nous faire perdurer notre modèle salarial dans un monde numérique et désintermédié ?

Votre combat est juridique, économique, culturel, social

Oui, votre combat est juridique et, de surcroit, loin d’être évident. D’une part parce qu’Uber (de même que toutes les autres plateformes de VTC d’ailleurs) n'impose pas de clause d'exclusivité à ses chauffeurs, qui travaillent ainsi très souvent pour deux ou trois plateformes. D’autre part parce qu’ils ont une liberté totale dans le choix de leurs horaires, choisissant de se connecter ou de se déconnecter à l’heure de leur choix. Enfin, parce qu’il n’existe en réalité pas de vraie dépendance géographique, les chauffeurs n’étant liés à aucun lieu de travail fixe ni même approximatif.

Votre combat est ensuite économique : les plateformes numériques fondent leur modèle sur le recours aux indépendants, et calculent ainsi leurs mages en fonction des coûts liés à ce mode de collaboration. Vouloir les soumettre aux charges salariales et patronales d’un modèle dépassé est comme les vouer à disparaître sur-le-champ. Car aucune d’entre elles ne transformera les indépendants en salariés, aucune d’entre elles ne pourra recréer de l’emploi dans ces conditions ! Et donc de l’emploi sera détruit par cette procédure… Economiquement, vous avez tout faux !

Votre combat est bien sûr culturel : entre la vision du  travailleur d'hier lié pour longtemps à un seul employeur et l’autoentrepreneur de demain partageant son temps entre plusieurs entreprises, il y a un gouffre, un abime, un chemin irréconciliable. Vous ne comprenez pas cette nouvelle économie : vous la rejetez presque parce qu’elle sort du modèle social maîtrisé où l’employeur paie les charges, l’employé exécute, et vous contrôlez et sanctionnez. Vous cherchez à faire rentrer dans le rang ceux qui veulent plus de liberté. Culturellement, vous avez tout faux !

Sur un plan social, il faut oser réfléchir à un autre modèle. Vous le voyez, vous le redoutez même : notre modèle social est à bout de souffle. La loi Travail piétine, les négociations sur les retraites ou les indemnités chômage se font au forceps, les entreprises ont toujours plus de mal à embaucher en CDI, la complexité de notre droit social effraie, les rapports et études qui demandent plus de souplesse et une remise en cause complète affluent… Bref, l’urgence est à trouver un autre modèle, en collaboration avec ces nouveaux acteurs. Mais vous vous cramponnez, vous refusez l’évidence. Socialement, vous avez tout faux !

Votre position idéale vous permet de proposer une solution durable !

Chère URSSAF, ne soyez pas extrémiste, ne soyez pas braquée : aidez-nous à écrire pour demain les règles de notre droit social. Votre position est idéale. Du haut de votre tour de contrôle, vous voyez mieux que personne arriver la révolution numérique, vous savez comment mieux comptabiliser les droits d’un actif, vous savez où mettre le curseur en matière de protection sociale, de recouvrement. Vous sauriez discuter avec les plateformes pour en faire des partenaires de confiance, tiers déclarants de leurs indépendants affiliés. Bref, d’un acteur qui châtie, devenez un acteur qui construit !

Si Uber et tous les autres peuvent contribuer à faire évoluer un Code du travail, c’est tant mieux ! A vous de vous en saisir et de proposer pour demain un modèle pérenne et intelligent ! Nous vous en serons tous reconnaissants !


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  • Date de Publication: 30/10/2015
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Le DRH d’Orange, Bruno Mettling, a remis mardi 15 septembre son rapport « Transformation numérique et vie au travail » à Myriam El Khomri, Ministre du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social.

Le rapport met en avant les effets de la transformation numérique sur le monde du travail.

6 impacts majeurs de la transformation numérique ont été identifiés :

- La diffusion massive de nouveaux outils de travail 
- L’impact sur les métiers et les compétences 
- L’impact sur l’organisation du travail 
- L’impact sur le management 
- De nouvelles formes de travail hors salariat 
- L’environnement de travail des cadres

Concernant les nouvelles formes de travail hors salariat, le rapport indique que "c’est sans doute l’une des questions les plus difficiles posée par la transformation numérique sur le travail, et son articulation avec l’entreprise traditionnelle. Dans le monde entier, la souplesse, l’adaptabilité mais aussi le business model de l’économie numérique repose sur la multiplication de l’emploi hors salariat. En France, au-delà de la symbolique du million d’auto-entrepreneurs atteint cet été 2015, on estime qu’un travailleur du numérique sur 10 exerce déjà aujourd’hui hors du champ du salariat et cela devrait continuer à augmenter. Les freelance, personnes exerçant une activité comme travailleurs indépendants, représentaient, en 2014, 18% du secteur des services aux Pays-Bas, 11% en Allemagne et 7% en France5 , en augmentation de 8,6% sur cette même année. La coexistence de ces nouvelles formes de travail et du salariat, la gestion harmonieuse de la transition de notre pays vers l’économie numérique, mais aussi une concurrence loyale supposent que soient posés de manière très claire et très ferme un certain nombre de principes essentiels à la préservation de notre modèle social."

Face à ce constat, le rapport présente 36 préconisations permettant d’accompagner la transition numérique.


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Montée des emplois précaires, poussée des indépendants et avènement du numérique bouleversent les fondements du salariat. Et imposent une révision de notre système de protection sociale. Par Anne Rodier et Valérie Segond, journalistes au Monde. Les deux journalistes interrogent tout à tour Alain Supiot, professeur au Collège de France,  Pierre Cahuc et Corinne Prost économistes du Centre de recherche en économie et statistique (Crest), David Ménascé, auteur du rapport " La France du Bon Coin, Jacques Barthélémy, membre de la mission Combrexelle, Jean-Emmanuel Ray, professeur de droit, Bruno Teboul, membre de la chaire Data Scientist de l'Ecole polytechnique ou encore Sandra Enlart, sociologue du think tank Entreprises &  Personnel.

Le XXIe  siècle sera-t-il celui de la fin du salariat ? La question surgit de tous les débats préparatoires à la 4e conférence sociale, qui se penche lundi 19  octobre sur la sécurisation des parcours professionnels et de l'emploi bousculé par les transformations numériques. Sans aller jusqu'à dater cette fin du salariat, Alain Supiot, professeur au Collège de France, l'annonce. " Le travail ne peut ni ne doit être réduit à la forme historique particulière qu'il a prise dans les sociétés industrielles depuis le XIXe  siècle, c'est-à-dire l'emploi salarié à plein temps, écrit le juriste. La forme salariée n'est qu'un moment de la longue histoire du travail "(Critique du droit du travail, PUF, 284 pages, 13  euros).

La transformation du marché de l'emploi est déjà à l'œuvre. Depuis 2000, la durée des contrats de travail s'est réduite comme peau de chagrin.Entre 2000 et 2014, le nombre d'embauches en contrat à durée déterminée (CDD) de moins d'un mois ou en intérim a augmenté de 61  %. Hors intérim, la part des embauches en CDD très courts – moins d'un mois - – a atteint 70  % fin 2014, tandis que le nombre des recrutements en contrat à durée indéterminée (CDI) stagne. " Il s'agit d'une transformation profonde, les CDD longs étant remplacés par de multiples CDD courts ", analysent les économistes du Centre de recherche en économie et statistique (Crest) Pierre Cahuc et Corinne Prost.

" des mois à zéro "

Dans le même temps, le nombre d'actifs non salariés progresse. Ces entrepreneurs permanents ou occasionnels, autœntrepreneurs, pluriactifs, étaient 2,8  millions en  2011, en hausse de 26  % (+ 550 000 personnes) en cinq ans (Emploi et revenus des indépendants, Insee, édition 2015). Pour l'Insee, " le renouveau du travail non salarié s'inscrit dans une tendance à la diversification des formes d'emploi (…) à la frontière du salariat et du non-salariat. " Les autœntrepreneurs représentent un non-salarié sur cinq. Le marché du travail français est toutefoisencore très loin de la fin du salariat,puisque la part des non-salariés n'est que de 10  % des actifs, contre 15  % pour la moyenne européenne. Mais il constitue un puzzle dont les pièces qui se détachent sont de plus en plus nombreuses.

Précaires, vrais-faux indépendants, ils sont de plus en plus d'actifs à perdre protection sociale et sécurité économique au fil de leur parcours professionnel. Timothée Fallet, qui a travaillé cinq ans en indépendant dans le secteur de l'audiovisuel, témoigne : " J'ai longtemps vécu avec moins de 450  euros par mois, jusqu'à fin 2014, avec des mois à zéro. "Il a depuis créé son propre emploi à partir du son projet de Café sauvage, en coopérative d'activité et d'emploi. Si les indépendants se distinguent des autres travailleurs par le fait qu'ils n'ont pas de lien de subordination juridique permanent à l'égard d'un donneur d'ordres, ils ne bénéficient pas non plus de la protection du droit du travail liée au contrat de travail. C'est le cas de ceux qui vendent leurs microservices sur Internet. Généralisées par le numérique, ces microactivités, ont restauré le travail à la tâche. Des plates-formes Internet, comme Weclaim pour les services juridiques, VizEat pour les cuisiniers à domicile ou Textmaster pour la traduction, mettent en relation des particuliers ou des entreprises avec ces " crowdworkers " qui sont souvent des indépendants précaires.

D'autres n'ont ni la protection du droit du travail liée au contrat de travail ni la sécurité économique que leur confère la diversité de la clientèle propre au statut d'indépendant. Des formes hybrides de travail indépendant se sont ainsi développées, dans lesquelles les indépendants sont devenus dépendants. L'entrepreneur ou autœntrepreneur se voit imposer par l'entreprise dont il dépend son mode d'organisation. La plate-forme Uber, par exemple, fixe unilatéralement le prix des prestations. C'est elle qui en reverse le produit après avoir prélevé sa commission, elle qui définit un cahier des charges sur la tenue des chauffeurs et le service au client. Et encore elle qui, par un système d'incitations, encourage le prestataire à travailler le plus possible. " Juridiquement indépendants, les chauffeurs sont dépendants économiquement d'Uber, car sans elle ils perdent tout accès à leur marché ", explique David Ménascé, auteur du rapport " La France du Bon Coin " publié en septembre (note de l'Institut de l'entreprise).

Ces formes de travail échappent aux réglementations professionnelles, les plates-formes numériques étant des entreprises d'intermédiation, jamais rattachées aux secteurs qu'elles investissent (transport pour Uber, hôtellerie pour Airbnb, etc.). Elles échappent aux accords collectifs sur les salaires et souvent aux législations nationales du travail, puisque Internet ignore les frontières. Le phénomène, qui n'est pas franco-français, toucherait déjà 1  million de personnes en Allemagne. Le grand syndicat IG Metall a d'ailleurs créé en mai une plate-forme pour les fédérer et défendre leurs droits.

Le travail en est ainsi réduit à une marchandise, échangée en l'absence de toute règle juridique. Un résultat emblématique de " la fracture interne au droit du travail entre d'une part les travailleurs qui jouissent pleinement des droits de la personne garantis par le “contrat de travail typique” et d'autre part ceux qu'un “contrat atypique” rejette du côté du travail-marchandise ", explique Alain Supiot.

L'essor du numérique rend urgente une adaptation de la société à cette mutation. Déjà, les start-up s'affranchissent du code du travail. " Construites sur une organisation plus agile, structurée en mode projet, ouverte sur un écosystème ", ces sociétés se caractérisent par " la multiplication de l'emploi hors salariat ", souligne le rapport " Transformation numérique et vie au travail " remis le 15  septembre au ministère du travail par Bruno Mettling, DRH d'Orange. Les start-up et autres TPE s'appuient beaucoup sur le télétravail et des collaborateurs nomades que l'on retrouve dans les espaces de coworking ou au café avec leur portable. Le contrat de travail, qui fixe le lieu et la durée de l'activité, n'est pas adapté à ce mode opératoire.

Créer un troisième statut

Mais quelles règles changer pour protéger tous les actifs ? Le droit du travail ou la protection sociale ? Côté droit du travail, le rapport Sciberras-Antonmattei, réalisé en  2008 à la demande du ministère du travail, proposait de créer un nouveau statut, ni salarié ni travailleur indépendant, mais " travailleur économiquement dépendant ". Il concernerait les indépendants qui travaillent seuls, perçoivent au moins 50  % de leur revenu d'un seul donneur d'ordres et dont l'organisation dépendrait de l'activité du donneur d'ordres. Ce troisième statut permettrait de se libérer des contraintes de temps de travail, par exemple, mais bénéficierait de règles de protection sociale qui lui seraient propres : extension du régime des indépendants et mise en place de garanties spécifiques, notamment sur les accidents de travail, et plus de protection de l'activité professionnelle. Il aurait aussi ses propres instances de représentation professionnelle. Ce statut pourrait être mis en place par la négociation collective ou le législateur.

L'avocat en droit social Jacques Barthélémy, membre de la mission Combrexelle, propose, pour sa part, de créer un " droit de l'activité professionnelle " composé d'un socle de droits fondamentaux applicables à tous les travailleurs, quel que soit leur statut. Et il ajoute : " Le niveau de protection ne sera alors plus lié à l'appartenance à un statut mais au degré d'autonomie, donc de responsabilité. Dans cette quête, le concept de para subordination, que connaissent certains Etats voisins du nôtre, jouera un rôle essentiel, celui de catalyseur. "

Toutefois créer un troisième statut du travailleur " économiquement dépendant " comporte des risques : " Même si, intellectuellement, c'est séduisant, estime le professeur de droit Jean-Emmanuel Ray. D'une part, ce troisième statut déstabiliserait les deux autres ; d'autre part, cette innovation nécessite une définition juridique précise, avec la création d'un seuil au-delà duquel le travailleur n'est plus économiquement dépendant. Ce qui induira des effets de contournement de la norme, avec un risque réel de judiciarisation. " L'idée d'un statut de travailleur économiquement dépendant avait déjà été avancée dans les années 1930, avant d'être abandonnée.

Pour comprendre ce qui, de la protection sociale ou du droit du travail, doit être débattu en priorité, il faut rappeler pourquoi ce dernier a été créé. Il est né de " la nécessité de garantir la sécurité du travailleur ", rappelle Alain Supiot. Dans quel but ? " Assurer la reproduction de la force de travail. " Ce qui consiste à répondre non seulement " aux exigences biologiques de la reproduction de la force de travail ", à savoir la sécurité physique du travailleur dans l'entreprise, mais aussi " aux exigences sociales " qui permettent de maintenir l'actif dans la société (revenu minimum et protection sociale). Salarié, indépendant, dirigeant, dirigé, commerçant, agriculteur doivent donc être soumis à " un même principe de solidarité ".

C'est loin d'être le cas. Au-delà des droits à la retraite ou à la Sécurité sociale, sortir du salariat en CDI, qui est légalement la forme normale du contrat de travail, prive aussi les actifs de l'accès au logement ou au crédit. " Heureusement que j'avais été salariée durant vingt ans avant de me mettre à mon compte, témoignait ainsi une jeune femme aux entretiens de la cohésion sociale, le 8  septembre, à la Maison de la chimie, à Paris, car depuis que je suis autœntrepreneuse, la banque me refuse tout accès au crédit. "

" Les nouvelles formes de travail digital doivent permettre à chacun de vivre ", résume Bruno Teboul, membre de la chaire Data Scientist de l'Ecole polytechnique. L'enjeu n'est donc pas tant d'élargir ou d'alléger le droit du travail que d'élargir la protection de tous les actifs, en protégeant les transitions professionnelles. Pour ce faire, " on ne peut se limiter à une réforme du droit du travail ", affirme la sociologue Sandra Enlart, du think tank Entreprises &  Personnel. Elle propose de " repenser les intermédiations (Pôle emploi, plate-forme Internet, etc.) et de réinventer les formes de représentation professionnelle, comme l'Italie l'a déjà fait pour représenter les indépendants et les intérimaires. " Aux Etats-Unis, une nouvelle forme de représentation professionnelle a ainsi vu le jour : le Free-Lancers Union, qui défend les droits des free-lance et compte aujourd'hui 250 000 membres. " En France, Génération précaire a déjà lancé le mouvement, avec la défense des stagiaires et des précaires ", note Sandra Enlart.

" Chacun doit pouvoir se situer sur le marché du travail à partir de ce qu'il est, son âge, son rythme ", dit-elle. C'est là le véritable changement de paradigme à opérer pour " piloter l'emploi vers un projet social plutôt que vers une dégradation ". Le compte personnel d'activité (CPA), créé par le gouvernement et que le rapport de France Stratégie du 9  octobre recommande d'appliquer à tous les actifs sans distinction, pourrait être le début de la solution. Instauré par la loi Rebsamen, le CPA " rassemble - pour chacun - , dès son entrée sur le marché du travail et tout au long de sa - carrière - , les droits sociaux personnels utiles pour sécuriser son parcours professionnel - formation, pénibilité, assurance-chômage - . " Si France Stratégie est suivi dans ses préconisations, chaque actif devrait avoir son CPA au 1er  janvier 2017, date d'entrée en vigueur prévue par la loi. Ce projet, programmé aux débats de la conférence sociale, pourrait bien restaurer la sécurité économique et sociale pour tous.


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  • Date de Publication: 16/10/2015
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Comment façonner sa carrière à l'ère du numérique? Quels sont les emplois de demain? Uber va-t-il devenir le modèle universel de travail ? Un groupe d'experts dans lequel intervenait notamment Axelle Lemaire, secrétaire d'Etat chargée du numérique, s'est penché sur ces questions lors d'un débat qui s'est tenu, jeudi 15 octobre, au Women's forum à Deauville. Très vite, les discussions se sont portées autour du modèle controversé du service de chauffeurs américain. "D'ici 2020, la moitié de la main d'oeuvre travaillera en freelance, prédit l'estonienne Karoli Hindriks, fondatrice de la start-up Jobbatical.com. Pourquoi continuer à payer un loyer, avoir un bureau fixe quand on peut travailler de n'importe où?" Et Joel Dullroy, travailleur américain freelance, de renchérir: "53 millions d'Américains travaillent en indépendant, soit près d'un tiers de la main d'oeuvre outre-Atlantique. Parmi eux, 60% sont des d'hommes et 40% des femmes."

1 million d'auto-entrepreneurs

En Europe, ils ne sont que 15%. "La France enregistre 1 million d'auto-entrepreneurs, rapporte Axelle Lemaire. Même si ce chiffre comprend de nombreux 'profils inactifs', il n'empêche qu'il a progressé de 8% entre 2013 et 2014". L'Hexagone est donc aussi en train de se tourner, très progressivement, vers un nouveau modèle, qui concerne pour l'instant essentiellement les secteurs des transports, des services à la personne ou encore le domaine de la santé. Si tous les emplois ne vont pas disparaître bien sûr, le paysage professionnel change. Il pourra être créateur de richesse et de bien-être, mais il faudra l'accompagner car il pose de nombreux problèmes, notamment de protection sociale.

Trouver un nouveau modèle de protection sociale

Uber, qui ne partage pas ses profits avec les chauffeurs et qui ne se comporte pas comme un employeur en ne cotisant pas aux organismes sociaux, "doit-il participer au financement du droit au chômage, à la retraite?, interroge Axelle Lemaire. Le modèle français voudrait qu’Ubersoit une coopérative, or c’est une société très capitaliste". Comment protéger les travailleurs freelance: "En Europe, et en particulier en France, nous partons avec un atout: la vision que l’on a de la protection sociale, bien ancrée dans les usages et les mentalités, constate la secrétaire d'Etat. Myriam El-Khomri, ministre du Travail, prépare une loi pour l’adapter aux nouvelles formes de travail, autour de l’idée d’un compte personnel d’activité qui pourrait peut-être, un jour, regrouper aussi toutes les allocations".


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Patrice Cristofini, european executive VP secteur santé de Huawei, Président d'Honneur de l' AFTIM et Jacques Marceau, président d'Aromates, fondateur des Assises de l'Innovation Thérapeutique publient sur La tribune un article sur la "révolution digitale" et son impact sur le secteur de la santé jusqu'à présent très préservé des grandes transformations économiques. D'après eux, si les mécanismes de protection de la propriété industrielle et de la régulation ont tenu la santé à l'écart de phénomène, l'arrivée du big data et le passage du curatif au préventif pourraient avoir raison de cet état de fait. Extraits.

 

Autant de barrières à l'entrée qui l'ont, et jusqu'à présent, mis à l'abri des ruptures observées dans les autres secteurs de l'économie. Aussi, ceux qui continueront de penser que la santé n'est pas un domaine comme les autres, et donc difficilement remis en question par un modèle innovant, en seront, et de toute évidence, rapidement pour leurs frais. Force est cependant de constater que les freins à « l'ubérisation » du secteur de la santé n'ont pas trop mal fonctionné jusqu'à présent et ont permis à ses acteurs de se préparer « au grand saut » en repensant tant l'organisation de la prévention et des soins que leur financement.

Le changement du risque

C'est ainsi que les financeurs complémentaires de l'assurance de personnes et de la santé, comme les mutuelles, les instituts de prévoyance, les assureurs ou les sociétés d'assurance mutuelle, se sont tous engagés dans une réflexion et ont parfois déjà mis en œuvre la refonte de modèles dont les fondamentaux sont aujourd'hui remis en question. En effet, et c'est sans doute le premier facteur de changement (qui au passage n'a rien de numérique) : la nature même du risque a évolué avec la prévalence des maladies chroniques et le vieillissement de la population d'une part, et le renchérissement sensible des nouveaux traitements et plus généralement du progrès thérapeutique d'autre part. En d'autres termes, plus de malades et qui coûteront plus cher.

L'arrivée du big data

Dans le même temps, les systèmes et les outils de la « gestion » du risque se modernisent, notamment grâce aux technologies du big data qui sont sur le point de transformer son actuelle approche statistique en une approche prédictive qui ne manquera pas d'avoir des conséquences sur les principes de répartition et de solidarité.
Ces financeurs gestionnaires du risque pourraient donc bien être amenés, à la faveur de ces mutations et du développement des technologies numériques connectées, à se muer en gestionnaires de la bonne santé de leurs assurés.

Le fameux passage du curatif au préventif, du « cure » au « care ». Devenir celui qui accompagne non plus seulement le parcours de soins , mais le parcours de santé de toute une vie.
Ils y sont d'ailleurs d'ores-et-déjà poussés par la part croissante du collectif en complémentaire, sur-complémentaire et supplétif, à la faveur de la mise en œuvre de l'ANI(1) qui va permettre de catalyser la construction de réponses intégrées, nouvelle génération de médecine au travail, comme l'offre « Entreprise Territoire de Santé » du groupe Malakoff Médéric. Des offres qui nécessiteront une parfaite maîtrise des données et de leurs usages sécurisés. Mais aussi de nouveaux modèles économiques qui pourront émerger d'une redéfinition de la part des complémentaires et du reste à charge pour le citoyen assuré social.

Les effets positifs de changements de comportements

Cette partie de « sur-complémentaire » pourrait en effet constituer la réponse au financement de l'innovation digitale et des nouveaux services connectés proposés aux adhérents. Tout cela en contrôlant une possible augmentation des coûts de l'enveloppe globale de l'assurance proprement dite au profit de services digitaux dans une nouvelle répartition. A contrario, ces coûts supplémentaires devraient être contrebalancés par les effets positifs de cette nouvelle capacité à éduquer et à assurer un suivi personnalisé notamment auprès des malades chroniques et des personnes âgées.

A moyen terme le renforcement du rôle des plateformes de services, à l'instar de ce que proposent déjà les TPA - Third Party Administrator (2) dans certains pays, sera sans doute déterminante pour permettre une réduction des coûts tout en maintenant un niveau de garanties et de qualité élevés, tant pour les entreprises que les citoyens dans l'assurance de personnes. 
Ainsi transformées, les complémentaires santé seront parfaitement positionnées pour apporter à leurs adhérents et aux entreprises, bien plus que le simple remboursement de soins, une palette infinie de services au bénéfice de la santé humaine et du progrès social.

(1) ANI (Accord National Interprofessionnel) : loi relative à la généralisation de la complémentaire santé.
(2) Les TPA, Third Party Administrator sont des instances tierces missionnées pour assurer la gestion des assurances de salariés


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OLIVIER PASSET, Directeur des synthèses économiques de Xerfi, publie une analyse très complète sur la "crise de la rétribution" du travail. Il revient sur les "vertus du salariat" mais fait le constat que cette base est en fort déclin, ce qui réduit la capacité correctrice de la fiscalité et de la protection sociale. Il résume la fuite salariale à 4 formes : la gratuité pure, le travail collaboratif consenti, l'ubérisation, et le travail au noir.

La montée des inégalités au sein des économies, est l’une des causes structurelles les plus régulièrement convoquée pour expliquer la crise des débouchés que traverse l’économie mondiale. Parmi les antidotes pour échapper au spectre de la stagnation séculaire, l’idée de colmater les fissures du vieux « compromis fordiste » ne relève plus d’un discours minoritaire. Les grandes institutions internationales, du FMI en passant par l’OCDE, l’ont même érigé en quasi-doctrine officielle et la problématique traverse aujourd’hui l’ensemble des régions du monde. Pour écouler son offre, le capitalisme redécouvre qu’il a besoin d’une redistribution équitable de ses gains de productivité, qui permette de démocratiser l’accès d’une large frange de la population aux nouveaux biens ou services.

Pour écouler son offre, le capitalisme redécouvre qu’il a besoin d’une redistribution équitable de ses gains de productivité

C’est par une meilleure redistribution verticale, des plus riches vers les plus pauvres, et horizontale, entre ceux qui subissent un risque et ceux qui ne le subissent pas, que le capitalisme a su, par le passé, résoudre son équation de débouchés. Et c’est ce compromis qu’il nous faudrait restaurer aujourd’hui, en réduisant les écarts primaires de salaire, et en renforçant le pouvoir redistributif de la fiscalité et de la protection sociale. La principale faiblesse de ce constat, c’est que, se référant à un concept historique, il nous oriente vers des outils eux-mêmes traditionnels que les politiques peinent à mettre en œuvre dans le contexte intense de concurrence entre les nations.

Les vertus du salariat

A trop se focaliser sur la problématique du salaire minimum et sur celle de la redistribution secondaire, on oublie parfois une seconde dimension essentielle du socle social sur lequel s’est bâtie la prospérité des Trente glorieuses : la généralisation du salariat, qui a formalisé la relation de travail et sa rétribution. Ce statut, a notamment permis de sortir de l’ombre, de monétiser et de sécuriser un travail qui existait déjà, mais sur un mode informel et sans vraie reconnaissance marchande.

La généralisation du salariat a fait notamment reculer tout le travail à façon ou à la tâche, permettant d’adosser des droits à des formes archaïques de relation de travail, sous rémunérées, sous organisées et sous assurées. Il a permis aussi de faire reculer le poids des emplois non rémunérés, dans les exploitations agricoles ou dans le commerce notamment, beaucoup de femmes assurant alors des tâches essentielles sans statut particulier et sans droit à la retraite. Il a enfin permis de monétiser une partie des tâches domestiques, en les externalisant. Un des principaux ressorts de la croissance d’après-guerre est précisément d’avoir fait sortir tout un pan du travail de la zone noire ou grise du gré à gré informel, de l’avoir inséré dans le circuit économique, élargissant considérablement la base des débouchés.

Une base salariale en déclin

Or avec le délitement du statut salarial, sa mise en concurrence avec des modèles d’affaires « ubérisés » ou mobilisant de la ressource gratuite, ce n’est pas seulement à une crise de la redistribution à laquelle nos économies sont exposées. C’est aussi à une crise plus profonde de sa rétribution. Relever ce défi est devenu prioritaire, car l’attrition de la base salariale réduit la capacité correctrice de la fiscalité et de la protection sociale, les plaçant dans une impasse financière. L’économie dite du partage, et à travers elle le développement des différentes formes collaboratives de travail, ne peuvent plus être traitées comme des épiphénomènes. Certes le travail collaboratif correspond à de nouveaux besoins de structures de productions plus horizontales, fonctionnant sur le mode projet. Certes, il peut correspondre dans certains cas, pour les plus qualifiés en particulier, à un désir d’autonomie. Mais il constitue surtout une forme extrêmement balbutiante de contribution au travail, qui faute de formalisation crée d’importantes fuites dans le circuit économique, et une grande opacité dans le repérage de la création de valeur.

Les 4 formes de la fuite salariale

Cette fuite prend différentes formes. Elle va de la gratuité pure et simple, involontaire ou consentie, à la sous-rémunération.  Au rang de la gratuité involontaire, il faut ranger tout ce qui relève de la problématique du « consom’acteur ». On peut reprendre ici les termes de Pierre Collin et Nicolas Colin dans le cadre de leur rapport sur la fiscalité numérique de janvier 2013 : « les utilisateurs, bénéficiaires d’un service rendu, deviennent  des  quasi‐collaborateurs,  bénévoles,  des  entreprises.  Collectées,  stockées  et traitées pour être intégrées en temps réel à la chaîne de production, les données issues de  leur  « travail  gratuit »  contribuent  à  brouiller  la  frontière  entre  production  et consommation ».

Au second rang de la gratuité, il y a le travail collaboratif consenti, dans une optique de don contre don, et qui participe à la co-création de « communaux ». A cela près que de plus en plus souvent le pacte est rompu, lorsque la plateforme collaborative se vend et que certains empochent les gains d’un bénévolat librement consenti ou y greffent des recettes publicitaires ; à l’instar du Huffington Post lorsqu’il s’est vendu pour 300 millions de dollars à AOL.

Il y a enfin tout l’étage du travail « uberisé », qui permet à un intégrateur de mobiliser du capital et de la ressource humaine sous-utilisée, développant ainsi une nouvelle zone grise de travail, sous rémunéré et dérogeant au droit social. Cette tendance de fond a pour dernier avatar le développement par Amazon de son application Flex, grâce à laquelle chacun peut s’improviser livreur à la demande, durant ses heures perdues, pour 18 à 25 dollars de l’heure, en utilisant son propre véhicule et son smartphone.

Avec l’extension du travail collaboratif, c’est bien toute une zone grise du travail qui s’étend et qui fragilise le circuit de la consommation. La valeur créée par ce travail n’est cependant pas perdue pour tous, mais accaparée par un petit nombre. Pour sortir de cette crise de la rétribution, il faut non seulement repenser nos cadres juridiques, mais aussi se donner les moyens de tracer la valeur utile de ces contributions.


Description

Automatisation des tâches, émergence de nouvelles plates-formes d’économie collaborative… Le monde du travail connaît une mutation sans précédent. L’âge d’or du salariat est-il sur le point de prendre fin ? C’est ce que défend la députée de l’Essonne, vice-présidente des Républicains, qui prône une refonte de la fiscalité du travail. Retrouvez Nathalie Kosciusko-Morizet lors du débat ayant pour thème « La fin du salariat » dans le cadre du Monde Festival, samedi 26 septembre, de 14 heures à 15 heures à l’Opéra Garnier. Elle relève trois mouvements qui accélèrent le phénomène : la jeunesse qui rejette la subordination, les entreprises qui recherchent la souplesse, et la technologie numérique.


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Animé par la Fédération Nationale des auto-entrepreneurs (FNAE), cet observatoire a pour but d'analyser l'ubérisation, d'apporter un constat précis et de proposer des pistes de réflexion autour de la réforme du code du travail, du dialogue social, de l'évolution du Droit, de la protection des travailleurs affiliés aux plateformes...

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