Les économistes, y compris le prix Nobel Joseph Stiglitz ou encore Daniel Cohen, éminent professeur directeur de l’Ecole d’économie de Paris, minimisent l’impact de « l’uberisation » sur le PIB. En fait, il faudrait réinventer le calcul du PIB pour y voir des réels impacts. C'est ce que démontre Dominique Thiebault, Journaliste sur Challenges.fr
Dernier avatar économique de ce nouveau siècle, l’ « uberisation » est en marche. Et du coup on peut se demander comment évaluer en points de PIB l’impact de ce phénomène qui touche de plus en plus de secteurs ? En fait, les experts s’interrogent déjà sur le fait de savoir s’il n’y aurait pas une sorte de mine de croissance cachée dans l’économie dite « collaborative », qu’il ne faudrait pas confondre avec l’économie « parallèle » ou encore la « virtuelle »... En tous cas, voici venu le temps de réaliser une grande équation, en calculant un « super PIB » du XXIème siècle, ce qui au passage permet de nettoyer notre bon vieux PIB qui correspond de moins en moins à la réalité économique.
Le problème majeur est d’évaluer les « valeurs ajoutées » - c’est le nom donné aux composants microéconomiques par secteurs du PIB qui en est la somme macroéconomique. Très vite on se rend compte qu’il convient de mener une révolution méthodologique. Certains économistes académiques s’y sont attelés. Avec des résultats décevants. L’activité collaborative, ne pèserait que 3,5 milliards de dollars au niveau mondial. Pourquoi un chiffre si symbolique, alors que la capitalisation d’Uber par exemple, est d’une cinquantaine de milliards ? Parce que par nature même, cette économie là ne ferait que rentabiliser des ressources qui existent déjà. Uber utilise des vraies voitures, avec de la vraie essence dans le réservoir et en principe des vrais chauffeurs formes, autant d’éléments tangibles déjà comptabilisés dans notre bon vieux PIB. Reste la simple valeur ajoutée apportée par ce service…
Daniel Cohen, en éminent professeur directeur de l’Ecole d’économie de Paris qu’il est, se borne à observer que « depuis 30 ans la croissance n’a pas cessé de diminuer ; malgré une révolution numérique sans précédent » Mais si ladite révolution technologique transforme notre rapport aux services, notamment par suppression des intermédiaires et des filières, le gain économique est loin d’être évident explique David Vives, dans les colonnes de l’hebdomadaire Epoch Times…Philippe Moati (Université Paris-Diderot), explique pour sa part le pourquoi du comment de ce qui rend muette la fille collaboratrice de l’économie réelle: « C’est du capitalisme sans capital. Par exemple, le covoiturage fait de l’argent avec la voiture de son adhérent et AirBnb n’a pas – ou très peu- d’immobilisations». Certes encore, mais avec justement ce presque rien AirBnb, vaut plus cher que l’ensemble des grandes chaînes hôtelières…
Tout en haut de l’échelle des économistes, le Prix Nobel Joseph Stiglitz, connu- entre autres - pour ses réflexions sur le PIB déclarait récemment dans Le Monde : « Pour l’instant, Facebook, AirBnb, l’économie collaborative ne génère pas de gains de productivité aussi puissants que ceux de la révolution industrielle et nous ne savons pas mesurer ce qu’elles apportent dans le Produit Intérieur Brut ».
Bon, on veut bien le croire, comme les autres ; mais cela rappelle furieusement les débuts du e-commerce : les experts disaient « cela ne va pas faire grand chose, peut-être 1 à 2% du total des achats des consommateurs… ». Quand même, on a envie de prendre une calculette et de faire une multiplication de ce … pas grand chose par des multitudes qui les supportent ! Comme par exemple des fractions de temps-machines ou autres critères repérables et mesurables ? Ou bêtement la consommation d’électricité des fermes de stockage de cloud et autre big data, comme on faisait au siècle dernier pour calculer le PIB des pays africains dépourvus de comptabilité nationale sérieuse. Puisque les macroéconomistes déclarent forfait, il faut faire soi-même le travail : à nos calculettes !